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N° 1437 - Lettre XXII - Rico à Véro [THEAT] par Véronica

Véro !!!!

Ça y est, c'est la gloire !

Pourtant la soirée avait mal commencé. Ce soir-là, j'avais décidé d'aller au théâtre avec Thomas. Je te mets une photo qu'on a faite le matin même. (On ne me voit pas bien parce que j'étais plongé dans le programme du festival.)


D'abord, c'est normal, j'avais voulu porter une cravate pour l'occasion et comme je ne savais pas la nouer, ça nous a mis en retard. La pièce, un drame d'Ibsen, venait malgré tout de débuter quand nous nous sommes installés sous les regards noirs de tous les spectateurs de la rangée qui ont dû nous laisser passer. Sur scène, un homme et une femme étaient engagés dans un dialogue. Mais bien vite, j'ai pensé que nous étions mal placés parce qu'on ne comprenait rien de ce qu'ils disaient, il y avait comme un larsen. Et les spectateurs de la rangée, furibonds, se sont à nouveau levés pour que nous passions, en nous assénant encore des regards assassins. Nous nous sommes alors installés au premier rang, marchant sur quelques pieds au passage. Très vite, je me suis rendu compte que le problème venait du sonotone de l'acteur principal, Robert Hossein, qui devait être trop près du micro. Sans tenir compte des chut courroucés des spectateurs des cinq premiers rangs, ni de l'actrice qui s'était figée sur scène - mais pas Robert Hossein, qui ne devait rien entendre -, j'ai quand même dit ce que j'en pensais :
- Il faut assainir la profession. Les acteurs cacochymes et séniles n'ont rien à faire sur une scène !... L'essai n'est pas concluant quand on prend un barbon aux allures de sénateur pour jouer un homme encore jeune ! Non, décidément, c'est obscène de...
Je n'ai pas eu le temps de finir ma phrase, le service de sécurité du théâtre nous avait déjà saisis par le col et jetés sans ménagement sur le trottoir...

Et là, qui nous aide à nous relever ? Jonas Hassen Khemiri ! Qui connaît très bien Thomas parce que le premier avait écrit le scénario d'une adaptation d'un texte que le second avait joué sur la scène de la Schaubühne ! Et là, il nous dit qu'il a justement rendez-vous avec un mécène qui veut produire une adaptation théâtrale d'Arsène Lapin et qui cherche un dramaturge français pour donner un ton authentique à la mise en scène. Et là, Thomas lui dit que justement, je suis français, alors Jonas nous embarque au rendez-vous, et... oui, c'est bon, le contrat est signé !

Il faut absolument que tu viennes pour voir à quoi ressemble cette aventure, on nous a loué un lieu magnifique pour le travail d'écriture, je suis sûr que je peux compter sur toi pour deviner où !

Alors rendez-vous dimanche midi à la gare de

[Note de l'éditrice : le morceau inférieur droit de la lettre a été arraché.]